Les enchères

Le but des enchères, comme nous l'avons déjà vu, est de déterminer le contrat auquel se jouera le coup. Si les joueurs pouvaient se montrer mutuellement leurs jeux, le problème des enchères serait facilement réglé : le camp possédant le plus grand nombre de points, tant en honneurs qu'en distribution, pourrait sans hésiter choisir le meilleur contrat possible, tandis que l'autre camp serait réduit à « défendre le coup », c'est-à-dire à empêcher le déclarant de faire son contrat. Les choses ne sont pas aussi simples, et c'est là, sans doute, l'un des plaisirs du bridge que la période des enchères au cours de laquelle, méthodiquement, les partenaires se renseignent sur la nature de leurs jeux, leurs forces, et leurs possibilités.

Examinons d'abord le problème dans son ensemble (pour le détail des enchères, voir ci-après). Le total des points de Work contenus dans les 52 cartes s'établit comme suit :

4 As = 16 points
4 Rois = 12 points
4 Dames = 8 points
4 Valets = 4 points
Total = 40 points

Si les honneurs sont également répartis entre les quatre joueurs, chacun d'entre eux a une main de 10 points et chaque camp possède 20 points. En principe, tout combat engagé sur cette base est incertain : la victoire ou la défaite dépend de la distribution, ou des plus-values. Cherchons, par un calcul simple, à déterminer combien de points doit posséder un camp (en réunissant les deux mains) pour faire un contrat donné.

Comme il y a treize levées dans le jeu, la valeur en points d'une levée est : 40 : 13 = 3,08.

Par conséquent, pour réussir un contrat de 1 Sans-Atout ou de 1 à la couleur, c'est-à-dire pour faire 7 levées, un camp doit posséder, entre les deux mains : 3,08 X 7 = 21,56, soit 22 points.

On peut déterminer de la même manière, et en tenant compte des incidences de la distribution ou de la nature du jeu, le nombre de levées nécessaires pour gagner une manche en un seul coup, c'est-à-dire pour réussir un contrat de 3 Sans-Atout, de 4 Cœurs ou 4 Piques, de 5 Carreaux ou 5 Trèfles. On peut aussi calculer le nombre de points nécessaires, au minimum, pour réussir un petit chelem (12 levées) ou un grand chelem (13 levées).

Voici les résultats pratiques sur lesquels on se fonde en général :

• avec 25-26 points, on peut réaliser 3 Sans-Atout
• avec 27 points, on peut réaliser 4 Piques ou 4 Cœurs
• avec 29-30 points, on peut réaliser 5 Carreaux ou 5 Trèfles
• entre 32 et 36 points, on se trouve dans la zone du petit chelem
• avec plus de 36 points, on se trouve dans la zone du grand chelem

Mais il ne faut pas prendre absolument au pied de la lettre ces indications. Il est des circonstances où l'on réalise 4 Piques avec 22 points entre les deux mains, et d'autres où l'on chute un contrat de 4 Piques avec 27 ou 28 points entre les deux mains. Les résultats précédents sont donc des moyennes, qui permettent aux joueurs d'orienter leurs enchères, et surtout de les limiter.

Quels sont donc les principes généraux qui doivent guider le déroulement des enchères ?

La première annonce de l'ouvreur doit renseigner son partenaire sur la force minimale de la main, et, sauf convention contraire, sur la couleur la plus longue et la mieux gardée (couleur dite déclarable). Nous verrons que, dans le cas où l'ouvreur a le choix entre deux couleurs d'ouverture (jeux bicolores), un certain nombre de précautions doivent pouvoir être prises. La réponse du répondant à l'ouvreur doit permettre à celui-ci de savoir :

• si son partenaire a un jeu suffisamment fort pour envisager de continuer les enchères et d'atteindre un contrat plus élevé que le contrat d'ouverture
• si ce partenaire possède un fit à la couleur d'ouverture, ou bien s'il a, au contraire, une autre couleur préférentielle
• si le jeu du partenaire est tel qu'on puisse envisager d'aller jusqu'à la manche, ou, éventuellement, jusqu'au chelem

Il est donc nécessaire que le répondant fasse une enchère suffisamment précise pour ne pas lancer l'ouvreur dans une aventure qui pourrait se terminer par une chute et qu'il lui laisse aussi la possibilité de reparler, c'est-à-dire soit de changer de couleur, soit de transformer l'orientation des enchères. En fait, les deux partenaires doivent toujours avoir le souci de faciliter le dialogue : c'est ce qu'on appelle le principe d'anticipation. En cours d'enchères, assez rapidement, on constate que les annonces doivent être menées par l'un des deux partenaires, qui a en main en quelque sorte la clef du problème. Il est alors impératif que son partenaire s'incline, et « obéisse » : c'est ce qu'on appelle le principe de subordination.

La suite avec le jeu de la carte.

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